Le responsable de territoire
La Caf de la Loire met en oeuvre son offre de service aux allocataires et aux partenaires selon une logique territoriale. Au sein du Pôle des territoires, les travailleurs sociaux interviennent sur chacun des quatre territoires ligériens : Forez-Montbrisonnais, Gier-Ondaine-Pilat, Roannais et St-Etienne.
Sous la coordination d’Anne Bub, 4 responsables de territoire sont les interlocuteurs privilégiés des partenaires de la Caf sur leur secteur géographique.
Questions à…
Brigitte Berthod, responsable du territoire du Gier-Ondaine-Pilat et Marie-Françoise Delévaque, responsable du territoire du Roannais.
Quel a été votre parcours avant de devenir responsable de territoire à la Caf de la Loire ?
Marie-Françoise Delévaque.- J’ai débuté à la Caf de Roanne en 1990 comme conseillère en économie sociale et familiale. J’intervenais sur le domaine du logement, dans lequel j’ai pris en 2002 la responsabilité de la CLU (commission de logement unique). Après avoir suivi pendant un an la formation d’encadrement des organismes de sécurité sociale, j’ai pris en 2006 les fonctions de médiatrice administrative. Enfin, en 2011, dans le cadre de la préparation de la départementalisation des Caf de la Loire, le territoire du Roannais a été constitué et j’ai été recrutée au mois de mai pour en assurer la responsabilité.
Brigitte Berthod.- Avant de travailler à la Caf, j’ai exercé les fonctions d’assistante sociale puis de responsable de service dans diverses institutions (éducation nationale, associations, conseil général). Mon précédent poste se situait dans le domaine de l’aide sociale à l’enfance. Ma candidature en 2010 aux fonctions de responsable du territoire du Gier-Ondaine-Pilat (relevant à l’époque du service d’interventions sociales de la Caf de St-Etienne) s’est inscrite dans la volonté de renouvellement que j’ai suivie dans ma carrière.
Comment sont organisées vos équipes ?
B.B.- Le territoire du GOP est basé à St-Chamond. Il est composé de 9 travailleurs sociaux et 4 secrétaires, qui accueillent les allocataires sur 3 sites parmi les plus fréquentés du département : St-Chamond, Firminy et Rive-de-Gier. Par ailleurs, les travailleurs sociaux interviennent sur l’ensemble du territoire, dans le cadre de missions spécifiques liées à l’accompagnement social des allocataires ainsi que du développement social territorial.
M.-F.D.- Le territoire du Roannais est basé à Roanne, site sur lequel nos 9 travailleurs sociaux et 2 secrétaires accueillent le public et assurent nos missions institutionnelles dans les domaines de la parentalité et le logement.
Quelle est la mission du responsable de territoire vis-à-vis des partenaires locaux ?
B.B. et M.-F.D.– Claude Bertoux, directeur-adjoint, aime nous qualifier d’ “ambassadeurs” de la Caf sur nos territoires. Effectivement, nous représentons l’institution auprès de nos partenaires et dans ce cadre, nous devons expliquer la politique d’action sociale que la Caf met en oeuvre, mais également transmettre les besoins et les particularités du terrain.
Dans quel cadre les acteurs locaux s’adressent à vous ?
M.-F.D.- Nos partenaires avaient des habitudes de travail, du temps de la Caf de Roanne, avec des professionnels et administrateurs en place depuis un certain temps. L’équipe du territoire et moi-même en tant que responsable, ne sommes pas encore repérées systématiquement en tant que représentants de la Caf par nos partenaires, qui ont plus l’habitude de solliciter les conseillers techniques au titre de leur expertise. Depuis la création du territoire du Roannais, mon rôle est donc d’aller à la rencontre de nos partenaires, notamment du conseil général, pour leur expliquer le nouveau fonctionnement de la Caf de la Loire et quels sont leurs interlocuteurs. Ces rencontres nous montrent que nous avons des enjeux et des contraintes parfois différents. Nous devons aussi tenir compte de la dimension politique : les changements intervenus dans le découpage intercommunal ont une incidence. Nous construisons de nouvelles relations de travail.
B.B.- Le territoire du GOP a sa place dans l’environnement local, nos partenaires (mairies, associations…) s’adressent à nous assez facilement, pour solliciter notre collaboration sur des projets collectifs, ainsi que pour faire remonter des demandes aux décisionnaires de notre organisme. Dans le cadre du développement de la politique de la ville, nous rencontrons régulièrement les représentants des municipalités dans les différentes instances. De même, en tant qu’instructeurs des demandes de subventions dans le cadre des CUCS (contrats urbains de cohésion sociale), nous travaillons avec l’Etat, la Région, les municipalités, St-Etienne métropole et les porteurs de projets.
La Caf de la Loire déploie depuis 2012 ses premiers projets de territoire. En tant que responsable, vous avez participé activement à leur construction. Quel est votre rôle dans leur conduite ?
B.B. et M.-F.D.- Le responsable de territoire est pilote du projet de territoire, il impulse et cadre le projet. Les éléments de connaissance de notre territoire permettent d’adapter notre intervention .
Cette démarche de projet est une manière particulière, difficile mais fructueuse d’approcher et d’aider les habitants sur un secteur donné.
Quelle est la mission du responsable de territoire vis-à-vis des allocataires vivant sur le territoire ?
B.B. et M.-F.D.- Vis à vis des allocataires, notre mission est de veiller à la qualité de la déclinaison de l’offre de service de la Caf sur notre territoire. Pour cela, nous sommes en lien avec les services internes de la Caf et les partenaires externes qui accompagnent aussi des personnes fragilisées.
Par la connaissance de notre territoire, nous mettons en évidence les attentes et les besoins des allocataires du territoire. A partir de ces constats nous sommes en capacité d’adapter l’offre de service aux allocataires. Nous organisons l’accueil de ces derniers, en lien avec la branche du service aux allocataires. Le responsable de territoire est garant du suivi social des personnes qui s’adressent aux travailleurs sociaux de la Caf. Les allocataires peuvent être accompagnés dans le cadre de la naissance d’un enfant, d’une séparation, d’un deuil, d’un impayé de loyer ou d’accession, d’un logement indécent… lors d’un changement de situation qui peut modifier ses droits. Dans ces situations, l’allocataire est reçu, suivi ou éventuellement orienté vers le service adéquat si la Caf n’est pas habilitée à l’aider.
Au-delà des missions institutionnelles auxquelles répond l’offre de service de travail social en direction des allocataires, les travailleurs sociaux de la Caf s’impliquent au quotidien dans des projets collectifs partenariaux, avec les habitants. Quels exemples peuvent illustrer ce travail collaboratif local ?
B.B.- A St-Chamond, dans le cadre du projet de rénovation urbaine du quartier de St-Julien, la Caf a pris part aux réunions des travaux de requalification. Tout au long de la conduite de ce projet, nous avons également veillé à conserver l’écoute des habitants.
M.-F.D.- Le quartier roannais de Mulsant, sur lequel il existe des indicateurs de pauvreté repérés dans le cadre du CUCS pour la ville de Roanne, a été l’objet d’un important investissement de nos travailleurs sociaux. Ceux-ci sont allés à la rencontre des habitants pour recueillir leur ressenti sur les atouts et les faiblesses de leur quartier. Les résultats de ces enquêtes ont été restitués aux habitants, pour définir avec eux des pistes d’actions à élaborer avec les partenaires. Ce type de travail participatif ne concerne pas uniquement les grandes agglomérations, car un projet analogue est développé actuellement sur le quartier du Fleury à Charlieu.
Vous déployez dans ces projets de développement social territorial des compétences de travail collaboratif. Comment l’appréhendent les travailleurs sociaux et quel est votre rôle en tant que chef d’équipe ?
M.-F.D.- C’est en effet une nouvelle posture à prendre pour eux, ce qui peut les déstabiliser dans leurs habitudes de travail, en particulier les personnels ayant le plus d’ancienneté. Mais ils s’en sont emparés avec énergie et envie. Ils “vont vers” les habitants au lieu d’attendre que les allocataires viennent à eux lorsqu’ils en ont besoin. On doit apprendre à se remettre en question, à ne pas se fixer des objectifs démesurés. Nous organisons des temps de restitution en équipe, qui sont essentiels pour ne pas se sentir seul. Pour moi, il est très stimulant d’encourager mon équipe dans cette voie, c’est un vrai challenge.
B.B.- La méthode est différente de celle de l’entretien individuel : les travailleurs sociaux sont par exemple amenés à animer des groupes. Le développement social territorial est une démarche dans laquelle l’habitant est considéré comme un acteur, ayant des compétences. L’idéologie sous-tendue est de susciter la solidarité et le faire-ensemble. C’est d’autant plus important à notre époque où l’individualisme règne, où beaucoup souffrent de l’isolement. Il faut du temps pour récolter les fruits de ces projets et pour les travailleurs sociaux, d’intégrer des pratiques de travail différentes.
Comment se situe votre fonction au sein de la Caf et en particulier en rapport avec les autres services ?
M.-F.D.- Je travaille de façon très rapprochée avec l’agent de développement social du pôle expertise d’action sociale, dans le cadre de l’accompagnement du projet de territoire ainsi que pour le repérage de domaines d’actions où une intervention des travailleurs sociaux apparaît pertinente. D’autre part, notre proximité géographique avec les services gestionnaires des dossiers allocataires favorise des contacts réguliers.
B.B.- La configuration du territoire du GOP, éclaté sur trois sites d’accueil, m’empêche d’être présente partout. Dans ce contexte, les secrétaires d’agence sont pour moi des collaboratrices essentielles. Elles sont le point d’entrée des demandes des allocataires ainsi que des partenaires au téléphone. Elles assurent l’organisation logistique sur les sites. Au niveau inter-services, on est au carrefour des relations internes. On travaille en transversalité avec le pôle expertise d’action sociale ainsi qu’avec les techniciens conseil. A mon arrivée à la Caf, j’ai beaucoup apprécié le parcours d’intégration dont j’ai bénéficié. Il m’a aidée à connaître les interlocuteurs internes et les services et à appréhender les circuits d’information.
Que vous apporte votre rôle de chef d’équipe ?
M.-F.D.- Pour moi, le changement n’est pas source d’angoisse, il est un moteur. Notre rôle a été d’accompagner la naissance de la Caf de la Loire. Je pense qu’il est important aujourd’hui de conforter les travailleurs sociaux dans leur légitimité au sein de l’organisme et vis-à-vis des partenaires. C’est un accompagnement que je mène au quotidien.
B.B.- Manager des travailleurs sociaux n’est pas toujours facile, ce sont des personnes exigeantes, mais aussi passionnantes. Je me considère comme un guide plutôt qu’un chef. Ce qui m’importe, c’est que mes collaborateurs se sentent bien dans leur travail, malgré les changements et les difficultés d’application des règles. On travaille avec “l’humain” : si on n’est pas bien nous-mêmes, il est bien difficile de parvenir à aider.